J’ai remis en question la simplicité des théories sur le fonctionnement du pied du cheval
pendant la plus grande partie de mes 25 ans de carrière. Traiter le pied du cheval avec aussi peu d’égard pour ses structures internes sensibles et le rôle que chacune joue, est pour le moins irresponsable.
Enseigner le soin aux sabots sur la base de théories anecdotiques antédiluviennes, et, dans certains cas, qualifier ces méthodes de « naturelles », est grotesque.
De nos jours, un grand nombre d’études portant sur le pied du cheval répondent aux critères de référence de l’Evidence Based Medecine [EBM, médecine factuelle, fondée sur l’étude de cas desquels se déduisent des généralités] ; il en existe néanmoins tout autant qui ne répondent pas à ces critères, seuls gages de crédibilité.
L’examen minutieux de milliers de pages de publications dites scientifiques a révélé un fait important : un fort pourcentage des actuels professionnels des soins aux pieds du cheval, qu’ils soient qualifiés de « naturels » ou « traditionnels », ne sont pas gênés, voire même se complaisent dans leur acceptation des plus simplistes des théories sur le fonctionnement du pied du cheval.
Les études anatomiques que j’ai menées et mes recherches en cours ont révélé l’importance de structures jusqu’à présent négligées, pourtant cruciales pour le bon fonctionnement du pied du cheval.
J’en suis arrivé à développer des théories qui font appel à la science de l’énergétique, qui va au-delà de la simple biomécanique et inclue la physiologie comme constituant.
La théorie de la suspension de la dynamique du pied (The Supension Theory of Hoof DynamicsTM), la théorie de l’Appareil de l’Arche Interne (Internal Arch Apparatus TheoryTM) et mes théories sur la croissance du sabot vont répondre aux nombreuses questions auxquelles sont confrontés les chercheurs, propriétaires de chevaux et professionnels des soins au sabot d’aujourd’hui.
Au minimum, ces théories nous offrent un point de départ à partir duquel évoluer, par opposition aux explications simplistes acceptées jusqu’à présent et qui nous procurent un certain confort dans le traitement du pied du cheval.
Ce qui suit est une brève description de mes théories sur la façon dont les énergies sont
gérées par le pied du cheval. Elle a été conçue pour aider à diminuer l’anxiété de ceux qui
sont dans la position de devoir questionner ceux des experts du pied qui se font le plus
entendre.
La gestion de l’énergie dans le pied du cheval (fonctionnement du pied) par KC LaPierre
Un examen attentif du coussinet digital et de la relation qu’il entretient avec les cartilages
latéraux et les tissus environnants interroge quant à leurs fonctions.
Plusieurs théories expliquent la fonction de l’ensemble anatomique coussinet digital-cartilages.
La théorie de la dépression soutient que le mouvement de l’ensemble P1+P2 dans le coussinet lors de la phase d’impact force les cartilages du pied à s’écarter vers l’extérieur, ce qui favorise la circulation et la gestion de l’énergie.
La théorie de la pression utilise le contact (solaire) avec le sol, avec la fourchette exerçant une poussée vers le haut sur le coussinet digital, forçant les cartilages latéraux à s’écarter vers l’extérieur.
Ces deux théories spéculent que le coussinet digital et la vascularisation qui l’accompagne jouent un rôle dans le gestion de l’énergie, le coussinet digital absorbant l’énergie.
Les tentatives pour expliquer la fonction hémodynamique du coussinet digital ont également suggéré que lors de l’impact, l’expansion vers l’extérieur des cartilages du pied se produit du fait du contact des barres avec les projections axiales des cartilages et du mouvement vers le bas de la colonne osseuse sur le coussinet digital.
Quand ceci se produit, l’hypothèse est que le sang veineux contenu dans les vaisseaux de la face palmaire du pied est chassé vers un réseau de micro-veines contenu dans les canaux vasculaires des cartilages unguéaux du pied.
La résistance hydraulique opposée à la circulation dans cette micro-vascularisation dissipe la forte énergie. Il est donc émis l’hypothèse que l’action hémodynamique du pied intervient dans l’établissement de la pression négative observée au milieu de la phase d’appui, et que cette pression négative permet le nouveau remplissage de la vascularisation du pied avant l’appui suivant 1,2.
Il est de plus émis l’hypothèse que la pression négative résulte du rapide mouvement vers l’extérieur des cartilages du pied.
Les recherches portant sur ces structures liées aux cartilages du pied et sur le coussinet
digital apportent des preuves qui pourraient être en contradiction avec les théories de la
pression et de la dépression, et soutiennent plusieurs aspect de la Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM.
L’examen de ces structures qui pourraient fonctionner de concert avec les cartilages et le
coussinet digital est nécessaire pour formuler une hypothèse de travail sur le fonctionnement du pied.
Il nous faut aussi également étudier les zones qui ont été par ailleurs négligées lors
des précédentes tentatives de compréhension du fonctionnement du pied.
Le bourrelet coronal et son attachement sont relativement peu décrits, en comparaison des ligaments, cartilages et coussinet digital. Sa liaison avec les cartilages unguéaux et le
processus extenseur pourrait se révéler une pièce essentielle du puzzle dans le cadre de la recherche d’une définition correcte du fonctionnement du pied.
Le bourrelet coronal (Pulvinus coronae) repose dans la gouttière cutigérale, en position
directement distale au chorion périoplique, proximale par rapport à la surface pariétale de la phalange distale (P3), et abaxiale par apport aux cartilages unguéaux.
Des études in vitro du bourrelet coronal suggèrent que sa relation aux ligaments et aux
cartilages du pied pourrait jouer un rôle significatif dans le flux hémodynamique 3. La Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM émet l’hypothèse selon laquelle, au cours de la phase d’impact avec le sol, l’ensemble P1+P2 commence à descendre, provoquant le déplacement vers l’extérieur des cartilages unguéaux.
Ce phénomène résulte de l’influence des attachements ligamentaires, fibreux et des fascias et du déplacement causé par le mouvement de la phalange moyenne (P2), par opposition au déplacement du coussinet digital.
La pression exercée sur la vascularisation du pied par le déplacement des cartilages
provoqué par le mouvement palmaire de P2, et la résistance opposée par le bourrelet coronal et son attachement restreignent le flux sanguin veineux.
La Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM émet de plus l’hypothèse que, juste avant le milieu de la phase d’appui, l’ensemble P2+P3 commence à remonter, ce qui permet l’évacuation du sang veineux alors sous pression.
Ce rapide échange de sang sous pression dans les cartilages unguéaux, et la vascularisation coronaire vers la veine digitale palmaire produirait une pression négative dans le pied. Ce phénomène conduirait à rejeter les théories de la pression et de la dépression, et aussi le concept de l’expansion du sabot comme cause de la pression négative dans le coussinet digital en milieu de phase d’appui.
La Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM redéfinit la fonction hémodynamique, pour y inclure une réaction hémodynamique.
La quantité de résistance rencontrée par le sang veineux durant la phase d’appui dépend de différents facteurs parmi lesquels l’état de santé de l’Appareil de l’Arche Interne, le
mouvement de l’ensemble P1+P2 et la force exercée.
Plus la force exercée est grande, plus le mouvement de P1+P2 a de l’amplitude, plus le bourrelet coronal doit exercer de résistance. La quantité de pression exercée à l’intérieur du pied durant les phases d’impact et d’appui est directement proportionnelle au mouvement de l’ensemble P1+P2, et à la résistance à l’expansion des cartilages opposée par le bourrelet coronal et la boîte cornée.
Ainsi, la réaction hémodynamique et l’utilisation de l’énergie dépend de la quantité de pression, et de la santé de la boîte cornée, des tissus conjonctifs, des cartilages unguéaux et du coussinet digital.
Tout mouvement directionnel des cartilages unguéaux, associé au mouvement distal
palmaire de P2, a pour conséquence une restriction variable du flux sanguin veineux sortant du pied.
Il est très probable que le mouvement médio-latéral et proximo-distal des projections
axiales palmaires des cartilages unguéaux influence le timing et le rapport force / pression
durant les phases d’impact et d’appui4. Il est facile de comprendre pourquoi le bourrelet
coronal a été négligé en tant qu’élément important du système de gestion de l’énergie du pied du cheval, car il est communément décrit comme de nature élastique 5,6,7.
La figure 1 (ci-contre) illustre la relation entre le bourrelet coronal (pulvinus coronae) et la
vascularisation de la partie proximale de la face palmaire du pied, durant l’impact. Les preuves anatomiques ici décrites appuient la Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM.
Le bon déroulement de la séquence chronologique (timing) est essentielle au bon fonctionnement du pied, et elle est déterminée par le mouvement de descente de l’ensemble P1+P2.
Ce mouvement de P1+P2 est déterminé par l’équilibrage de la boîte
cornée autour de l’axe du pied, et le placement de la surface la plus distale de l’angle de la barre (surface du talon) – voir ci-contre. La position de cette surface des talons est définie par la conformation des cartilages.
Figure 2. Sur la coupe transversale reproduite ci-dessus, le coussinet digital aurait peu
d’effets sur les mécanismes décrits par la Théorie de la suspension de la dynamique du
piedTM.
Les preuves anatomiques appuient l’hypothèse d’un Appareil de l’Arche Interne
fonctionnel, au sein duquel toutes les structures travaillent de concert pour réguler le flux
hémodynamique, la réaction hémodynamique et la gestion de l’énergie.
Les figures 3 et 4 ci-dessous illustrent l’importance de l’épine de la fourchette, et comment
son état de santé pourrait affecter la répartition des pressions dans la partie arrière du pied.
L’intégrité des talons, cartilages et coussinet digital seraient en rapport direct avec l’état de
santé de la fourchette et de son épine.
Cette hypothèse tendrait à nier la croyance simpliste selon laquelle la fonction première de la fourchette est de pomper du sang, ou d’agir comme véhicule du nécessaire déplacement du coussinet digital, ce que professent les théorie de la pression et de la dépression.
La Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM définit l’angle de la barre (la surface du talon) comme l’instigateur primaire du mouvement de descente de l’ensemble P1+P2 au moment de l’impact, et expliquerait pourquoi les chevaux de compétition sont capable de gérer les énergies engendrées par la vitesse avec des fourchettes loin d’être saines.
Les blessures semblent survenir plus souvent aux pieds dont la conformation des talons est mauvaise qu’à ceux dont les fourchettes sont malades, bien que des fourchettes malades ont souvent pour corollaire une mauvaise conformation des talons.
Si la ferrure corrobore les théories de la pression et de la dépression, et celle du flux hémodynamique, elle ne corrobore pas la Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM.
Les théories de la pression, de la dépression, et du flux hémodynamique n’impliquent que l’expansion et la contraction de la partie caudale du pied, alors que la Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM nécessite une distorsion tridimensionnelle des cartilages et de la partie palmaire du pied.
Le coussinet digital
Le coussinet digital est constitué tissus fibrocartilagineux, de tissus conjonctifs grossiers et de tissus élastiques. Une étude suggère que le coussinet digital contient du tissu myxoïde. Le tissu mixoïde est réputé continuellement se transformer en tissu conjonctif grossier plus ou moins organisé.
Il est dit que le coussinet digital des postérieurs contient une plus grande quantité de tissus adipeux et élastiques, ceci sans doute dû au fait que les antérieurs ont une plus grande capacité à porter du poids. Des études récentes suggèrent cependant que le coussinet digital ne contient que peu de graisse uniloculaire (qui ne comporte qu’une loge).
Si de fait on trouve du tissu myxoïde dans tout le coussinet digital, alors il est raisonnable de penser que son état de santé peut être amélioré par l’application de stimuli appropriés.
Le débat sur la fonction du coussinet digital continue.
Des études récentes indiquent que sa fonction biomécanique consiste à limiter le déplacement de la seconde phalange, ou d’être une structure passive qui permet la flexibilité des deux tiers caudaux du pied. Il est suggéré que le déplacement du coussinet digital est indépendant du support solaire.
La surface la plus profonde du chorion de la fourchette (corium cunei) est en contact avec le coussinet digital, ce dernier lui servant à la fois de conformation et de fondation. On ne trouve que peu de références vétérinaires à propos de la véritable fonction du chorion de la fourchette.
Des recherches ont été menées sur l’importance des propriocepteurs au sein de la zone du coussinet digital qui représente le chorion de la fourchette, mais il n’existe que peu de
preuves pour appuyer la théorie selon laquelle le chorion de la fourchette/coussinet digital joue un rôle dans l’exécution de la foulée.
Si on souscrit à l’hypothèse que l’état et la santé de la fourchette est le miroir de l’état et de la santé du coussinet digital, il devient difficile de souscrire à la théorie qui utilise la fourchette et le coussinet digital comme structures primaires en charge de favoriser une meilleure circulation sanguine dans le pied du cheval.
Cette affirmation est la réponse aux centaines de milliers de chevaux qui concourent à haut niveau tout en montrant des signes évidents d’un coussinet digital en mauvais état.
La Théorie de la suspension de la dynamique du piedTM définit la fourchette/coussinet digital comme le véhicule des stimuli, participant à la répartition des pressions dans la parti caudale du pied.
Cette hypothèse est corroborée par plusieurs études portant sur la fonction du coussinet digital. Les cartilages ungulaires (cartilages latéraux) Les cartilages de la phalange
distale sont fixés le long de la surface palmaire proximale des processus palmaires.
Cette insertion s’étend dorso-proximalement le long du bord proximal de la phalange distale (P3) jusqu’aux bordures latérale et médiale du processus extenseur, et abaxialement médiale et latérale de la ligne semi-lunaire.
De leur attachement à la phalange distale, les cartilages, avec plusieurs autres structures, agissent comme support du pied et du membre du cheval, et sont partie intégrante du mécanisme de gestion de l’énergie présent dans chaque membre 11.
Les cartilages du pied sont à leur origine de type hyalin et deviennent fibrocartilage chez le cheval adulte. Les caractéristiques morphologiques des cartilages de la phalange distale varient grandement tant en forme qu’en épaisseur.
Des variations des projections axiales depuis la bordure distale et de la vascularisation sont observables d’un spécimen à l’autre ; il existe une différence marquée entre l’épaisseur de ceux des antérieurs et l’épaisseur de ceux des postérieurs 1.
En plus de leur fonction de support et de dissipation de l’énergie, les cartilages du pied participent également à la fonction d’utilisation de l’énergie. La conformation du cartilage exerce une influence sur l’efficacité de l’utilisation et de la dissipation de l’énergie au sein du pied du cheval.
L’angle des projections abaxiales et axiales palmaires des cartilages, distales à l’attachement palmaire du bourrelet coronal, détermine la façon dont les énergies de l’impact sont reçues par l’Appareil de l’Arche Interne.
Le chorion porté par ces projections palmaires abaxiales/axiales des cartilages unguéaux produit les lamelles épidermiques des talons et des barres, la ligne blanche des barres et de l’angle de la barre (talons), la couche interne de la paroi des barres et des talons, et la corne de la sole dans la zone entre les barres et la paroi. La chorion coronal produit la couche externe de la paroi des talons et des barres.
L’angle de la barre (surface des talons en contact avec le sol) est la structure épidermique primaire pour la transmission des énergies créées durant la phase d’impact, jusqu’aux cartilages unguéaux, le long d’un plan proximo-palmaire d’attachement.
Références :
1 Bowker R.M., New Theory may help avoid Navicular, News Release, March 1999, Mich. State University,
2 Dyhre-Poulsen P., Smedgaard H.H., Roed J., et al: Equine hoof function investigated by pressure transducers inside the hoof and accelerometers mounted on the first phalanx, Equine Vet J 26:362, 1994
3 La Pierre KC, Lord R.A., et al: Unpublished data. Coronary Band Functional Anatomy: a biomechanical study, 2006
4 Denoix J-M., The Equine Distal Limb, An Atlas of Clinical Anatomy and Comparative Imaging, ed 4th, 2005, London, Manson Publishing Ltd.
5 Butler D., Butler K.D., The Principles of Horseshoeing, 3rd ed, pg 219, Doug Butler Enterprises, Co. 2004
6 Dollar A.W., The elastic tissues of the foot, In: A handbook of horse shoeing, New York: Jenkins Veterinary Publisher & Bookseller, 1898;15-16
7 Egerbacher M., Helmreich H., et al, Digital cushions in horses comprise coarse connective tissue, myxoid tissue, and cartilage but only little unilocular fat tissue, Anat, Histol, Embryol, Vol.34, 2:112, 2005
8 Egerbacher M., Helmreich H., et al, Digital cushions in horses comprise coarse connective tissue, myxoid tissue, and cartilage but only little unilocular fat tissue, Anat, Histol, Embryol, Vol.34, 2:112, 2005
9 Taylor D.D., Hood D.M., Potter G.D., Hogan HA, Honnas CM, Evaluation of the displacement of the digital cushion in response to vertical loading in the equine forelimbs, Am J Vet Res 66:623-629, 2005
10 Bowker R.M., Brewer K.B., et al: Sensory receptors in the equine foot, Am J Vet Res, 54: 1840-1844, 1993
11 Clayton H.M., Flood PF, Rosenstein DS, Clinical Anatomy of the Horse, 2005, Mosby Elsevier, Edinburg
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